« DRINK, buvons autrement » : des avancées pour la promotion de la santé

Dans un précédent article, le projet DRINK avait été présenté. Pour rappel, en bref, ses objectifs sont de réduire la consommation de boissons sucrées et d’augmenter celle d’eau du robinet par les élèves de fin de primaire.

Pour comparer l’efficacité d’un ensemble d’interventions, une équipe de recherche* de l’Ecole de Santé Publique de l’ULB a mis en place un essai contrôlé randomisé, avec des écoles réparties au hasard dans quatre groupes :

Le groupe mixte conjugue les deux types de levier, nutrition/santé et durabilité des consommations de boissons. Le groupe contrôle, qui est fondamental, permettra de juger si les évolutions des consommations de boisson sont liées aux interventions du projet ou à d’autres facteurs externes qui ne peuvent pas être contrôlés dans le cadre de la recherche (par exemple, les températures saisonnières, ou d’autres actions de promotion de la santé mises en place par les écoles, indépendamment du projet).

Grâce à ce schéma d’attribution aléatoire dans les groupes, les informations recueillies auprès des élèves et de leurs parents permettront de savoir :

  • dans quelle mesure les interventions mises en place sont efficaces,
  • si c’est le cas de façon similaire ou non entre les deux domaines (nutrition vs. durabilité),
  • et si la conjugaison de ces deux domaines « potentialise » leurs effets,

une des hypothèses principales du projet étant que, selon les enfants et leurs familles, leur sensibilité à ces différents « arguments » peut varier et qu’il est donc potentiellement intéressant de les conjuguer effectivement**.

Les fondements de l’étude « DRINK, buvons autrement ! »

Evaluer soigneusement des interventions, qui tiennent compte des évolutions dans les préoccupations des populations (du moins, d’une partie d’entre elles), ouvrira des perspectives nouvelles dans le développement d’actions de promotion de la santé nutritionnelle. Depuis quelques années, les preuves scientifiques s’accumulent en ce qui concerne l’intérêt potentiel, aux niveaux individuel et collectif, de conjuguer les leviers santé et environnement en matière d’alimentation [1]. Pourtant, aucune étude n’a jusqu’à présent été publiée sur l’évaluation d’interventions conjointes à ces deux domaines. C’est ce manque que l’étude DRINK cherche à combler et ce, grâce à la contribution d’une cinquantaine d’écoles en Belgique francophone !

S’il est vrai que les consommations de boissons sucrées ont tendance à diminuer au niveau international, ce n’est pas le cas en Belgique francophone : elle fait partie des pays ou régions ayant une part encore élevée de la population consommant chaque jour des boissons sucrées. En outre, un accroissement des inégalités sociales concernant la consommation quotidienne de boissons y est observé, depuis le début des années 2000, contrairement à d’autres pays d’Europe de l’Ouest [2].

Par ailleurs, diminuer la consommation de boissons sucrées sans encourager à augmenter celle de l’eau ne sera pas bénéfique, sachant que les niveaux d’apports hydriques sont considérés comme chroniquement insuffisants chez les enfants [3].

Enfin, compte tenu de l’impact environnemental des bouteilles en plastique (en Belgique, 2 milliards de bouteilles en plastique d’1,5 litre sont jetées chaque année), il va de soi que les enfants et leurs familles sont encouragés à se tourner vers l’eau du robinet.

Tous ces éléments sont déclinés dans les différents supports d’intervention développés par le projet et adaptés à leur public : enfants, parents et équipes enseignantes. Des brochures courtes, des posters, un site web avec des vidéos, des jeux, un dossier pédagogique… les reprennent.

Les premiers enseignements de l’étude

Tandis que les informations recueillies par questionnaire auprès des enfants et des parents commencent à produire leurs premiers résultats (à suivre dans un prochain numéro !), celles qui ont été collectées lors des rencontres avec les personnels des écoles sont déjà riches d’enseignements.

En 2021, avant la mise en place des interventions, des diététiciennes du Club Européen des Diététiciens de l’Enfance (CEDE) se sont ainsi rendues dans les 48 écoles participant au projet, pour s’entretenir avec la Direction ou d’autres membres du personnel (dans quelques écoles, ces interviews ont été réalisées par visioconférence, Covid-19 oblige). Ces entretiens, qui reposaient sur un guide standardisé, leur ont permis d’aborder différents thèmes tels que l’accès à l’eau dans l’école, les projets de promotion de la santé en matière de nutrition, les actions mises en place autour des questions environnementales, la participation des parents dans ces activités…

Ainsi, à des degrés très variables, la quasi-totalité des écoles recrutées avaient antérieurement mis en place des actions autour de l’alimentation, principalement autour de la qualité nutritionnelle, moins souvent autour des questions de l’alimentation durable. Ces actions consistaient le plus souvent en des recommandations auprès des parents sur les collations, moins fréquemment en une réflexion autour de l’offre à l’école. En matière de durabilité, qu’il s’agisse d’alimentation ou non, la plupart des écoles avaient aussi entrepris une démarche à ce sujet, principalement en ce qui concerne le tri et le recyclage des déchets. Seules 19 écoles avaient déjà proposé des repas végétariens.

Avant la mise en place du projet DRINK, les élèves de toutes les écoles étaient autorisés à disposer d’une gourde ou d’une bouteille d’eau et, dans la plupart d’entre elles, les élèves de toutes les classes étaient autorisés à boire dans la classe. Par ailleurs, dans de nombreuses écoles, il n’y avait pas de robinet accessible dans la cour de récréation mais la quasi-totalité disposaient de robinets ou de fontaines dans toutes ou une partie des classes.

Enfin, parce que leur participation aux activités de l’école est un élément clé de la promotion de la santé en milieu scolaire, nous nous sommes intéressés à l’implication des parents dans les activités de l’école. Ainsi, 17 écoles sur 48 percevaient une implication forte des parents dans les activités qu’elles proposaient, 20 une participation mitigée et le reste déclaraient une participation plutôt faible.

Ces premiers constats, s’ils sont encourageants de façon globale, soulignent néanmoins qu’un accès à l’eau adéquat tout au long de la journée et pour tous les enfants doit être encouragé. Soutenir les écoles dans ces évolutions est le but du projet DRINK. Il reste encore plus à faire en matière d’alimentation durable, notamment en ce qui concerne le choix des boissons et l’accompagnement des familles dans ce sens.

Pour toute information sur l’étude, vous pouvez contacter l’équipe à l’adresse suivante : drink@ulb.be

*Equipe en épidémiologie nutritionnelle dirigée par Prof. K. Castetbon et rattachée au Centre de Recherche en Epidémiologie, Biostatistique et Recherche Clinique (CR2) de l’ESP-ULB.

**Comme pour toute recherche en santé publique, un effet contre-productif ne peut être exclu, comme cela a été observé dans certains essais contrôlés en épidémiologie nutritionnelle. Pour des raisons éthiques, il reste donc fondamental de conduire des recherches scientifiques, afin que des effets éventuellement délétères inattendus puissent être soigneusement documentés et soient mis en regard des bénéfices mesurés.

Pour l’équipe DRINK,
Article rédigé par Katia Castetbon, investigatrice principale du projet DRINK, Ecole de Santé Publique (ULB).

Mis à jour le 21/10/2022